La tournée d'adieu
Après avoir savouré un pique-nique, un second, puis un repas de famille (avec un exceptionnel couscous cuisiné par Le Riad à Paulhac), là on est quasiment revenus à la normale de nos relations sociales. Si l’on excepte la disparition des bises, qui rend les premières secondes des retrouvailles toujours étranges : personne n’ose s’approcher, on a tous en tête le réflexe de bisouillage mais on sait tous aussi qu’il ne faut pas. Terminé les « embrassades » a dit le dépressif à la barbe bicolore de la télé.
On revoit donc de plus en plus nos proches et nos amis, et ça fait un bien fou. Je me suis rendu compte que c’était l’une des dernières occasions de voir certains d’entre eux avant notre déménagement. Et ça fait quelque chose. On a beau se dire qu’on les reverra, qu’ils viendront nous voir, qu’on reviendra aussi, ces dîners, ces apéros, ont quand même un petit parfum de tournée d’adieu. C’est peut-être le syndrome Patrick Hernandez qui me reprend.
Pour échapper au spleen, il y a la lecture. Avant de reprendre Tolstoï, je viens d’attaquer Retour de Service, le dernier roman d’espionnage de John le Carré, dont le seul nom a fait rire Myriam. Juste avant, j’avais lu La Rafle des Notables où Anne Sinclair raconte l’histoire de son grand-père Léonce Shwartz, victime en 1941 d’une rafle anti-juifs puis d’un internement dans le camp de Compiègne, des suites duquel il décédera en 1945. C’est une drame singulier et passionnant, mais malheureusement un livre peu mémorable, qui se contente la plupart du temps de s’appuyer sur quatre ou cinq ouvrages de survivants. C’est le problème des livres de journalistes, c’est sourcé comme un article de presse, et souvent peu étayé par l’expérience propre de l’auteur. Le second problème des livres de journalistes télé, c’est que leur notoriété leur permet de publier des bouquins qui ne pourraient normalement sortir qu’à compte d’auteur, c’est le cas ici.
Autre moyen d’échapper au spleen, l’observation de l’actualité locale. Dernièrement une nouvelle m’a mis en joie. Si vous suivez ce blog depuis quelques années, vous savez que j’ai souvent pourfendu la communication institutionnelle cantalienne, il faut dire qu’il y a matière à sourire. Certains d’entre vous se rappelleront de la pub TV sexiste et désuète Chantal t’as oublié le Cantal, qui avait coûté des sommes folles, pour un résultat d’image contre-productif, et un résultat commercial à peu près nul.
Cette fois-ci, nos décideurs ont ressorti d’un vieux placard, une publicité touristique qui aurait pu être signée Jean Roucas. Le slogan : « Cantallons-nous dans le Cantal ». Ha – ha – ha !
Vous vouliez du rêve ? Vous rêviez d’évasion, d’exotisme, d’authenticité ? Vous aviez envie de vivre une expérience ? Vous vouliez une nature préservée, saine, à perte de vue et qui surfe sur le besoin d’évasion des français après le confinement ? Avec des paysages à couper le souffle, ce petit parfum d’Irlande, et puis le pays vert de nos ancêtres ? Eh bien vous n’y êtes pas du tout, le Conseil Départemental nous dit que rien ne vaut une bonne vieille réclame de l’entre-deux-guerres.
Finalement, je vois cette publicité comme un hommage. Les cerveaux qui tournent en rond dans le cube du Gravier se sont sûrement dit que Pissavy partait bientôt, qu’il faudrait sortir une dernière connerie, histoire de pouvoir avoir l’honneur d’un billet sur ce blog à l’audience planétaire. Chers amis, du fond du coeur, merci ! Comme je ne suis même pas sûr qu’on ait touché le fond, je vais m’abonner à Cantal Avenir, la revue de propagande du Conseil Départemental. Ce serait dommage de rater les prochaines aventures de Bruno « The Genius » Faure, et de ses acolytes.
Florian L
le 11 juin 2020Bonjour Sébastien, j’aime bien lire tes billets, je suis un grand fan. Concernant le sujet de ce billet, je pense qu’il est pas simple de promouvoir le Cantal, on peu quand même leur accorder qu’ils ont au moins le mérite d’essayer. En tout cas j’espère que tu continuera de rédiger des billets après ton départ du Cantal. Bon courage et plein de bonheur pour la suite des aventures dans le Sud.
sergevi
le 11 juin 2020Il faut reconnaître que cette campagne montre bien le niveau actuel d’innovation dans notre belle contrée.. Pour moi ce fut un choc et j’ai instantanément revu cet autocollant sur le coffre de la 404 familiale .. C’était pas la semaine dernière !
lightman
le 11 juin 2020Merci Florian !
Serge> Je n’ai pas réussi à trouver l’année de la publicité originale. J’ai juste remarqué que c’était une initiative de la Jeune Chambre Economique de l’époque (qui n’existe plus).
courbebaisse
le 11 juin 2020Malheureusement tout à fait vrai.
Céline A
le 12 juin 2020Mais… Ils l’ont vraiment ressorti ? Je croyais, avec la résurgence du slogan, à une douce ironie au moment où le confinement nous enjoignait de nous replier sur nous même pour le bien de tous. Je n’ai jamais aimé ce slogan, parce qu’il incarne justement le repli sur soi. Bref…
lightman
le 13 juin 2020Céline> Ils l’ont en effet ressorti : incroyable mais vrai (c) J. Martin 1981.
Florian
le 15 juin 2020La Région Bretagne lance également une campagne de communication, je ne sais pas si ils ont ressorti les slogans des cartons mais bon y’a un peu plus d’originalité pour le coup même si on est dans le même registre, https://www.linkedin.com/posts/jessica-gachet-40225017_depaysezvousenbretagne-visitbretagne-cetetaezjevisitelafrance-activity-6676893199526715392-DnFw
lightman
le 15 juin 2020Florian> Pas mal la campagne bretonne, même si j’ai une préférence pour l’Aveyron qui joue dans le même registre mais sans les jeux de mots qui peuvent vite tomber à plat (exemple : « ty-cyclette » dans la campagne bretonne ne me parle absolument pas).
https://www.tourisme-aveyron.com/fr
Audiard
le 16 juin 2020Je trouve ce billet très dur et approximatif d’où ce complément.
Déjà, le vieux slogan n’a pas seulement été repris il a aussi été amélioré :
« Cantallons-nous dans le Cantal Auvergne ». Et, c’est bien là que réside toute l’ingéniosité des élites cantaliennes. En effet, cette accroche Auvergne est le nouvel axe de développement pour le territoire du Cantal Auvergne qui dépend de la nouvelle Marque Auvergne.
Cette démarche est donc très innovante : pour mieux commercialiser la destination Cantal, on en parle moins voir plus du tout, seule l’Auvergne importe.
Dans la continuité, le comité départemental de tourisme, Cantal Destination, a abandonné son site web pour fusionner avec son homologue du 63 sous la bannière « Auvergne Destination Volcan ».
C’est encore une fois très audacieux surtout quand on a conscience que pour la plupart des non-auvergnats, l’Auvergne c’est avant tout Clermont, le Puy de Dôme et l’ASM.
Commercialiser une destination sans la nommer, voilà un pari que personne n’oserai prendre et je ne doute pas que les retombées seront nombreuses pour l’« Auvergne ».
Saluons l’innovation !