Entremont, l'oppidum

Le 7 septembre 2020

« Le cerveau est un muscle ». L’expression sous-entend que, tout comme un athlète, notre cerveau doit être entraîné de façon régulière pour gagner en performance. C’est une expression que j’ai entendue lors de cette rentrée scolaire. J’y souscris bien volontiers, mais ce qui me gêne dans cette phrase toute faite, c’est qu’on l’emploie à toutes les sauces. Je me souviens de l’avoir utilisée moi-même pour dire qu’écrire était un muscle : moins on écrit, plus c’est difficile, plus on écrit de façon régulière, et moins l’effort paraît important.
Tenez, c’est comme l’expression « gouverner, c’est prévoir » attribuée à Adolphe Thiers, et qu’on a paraphrasé ad nauseam. Gérer c’est prévoir, assurément dans le cas d’une entreprise. Les vendeurs d’assurance-obsèques et les notaires prétendent quant à eux, qu’aimer c’est prévoir. Les agences immobilières qu’acheter c’est prévoir. Les consultants que manager c’est prévoir. Les informaticiens que programmer c’est prévoir. Les toubibs que soigner c’est prévoir – sauf le covid. La ménagère n’oublie jamais que manger c’est prévoir. Le musicien dans son orchestre sait que jouer c’est prévoir. Le joueur d’échecs ne le démentira évidemment pas. Le général d’armée déclare que faire la guerre, c’est prévoir. L’aviateur est sûr que piloter, c’est prévoir. De même que le champion de Formule 1 ou de rallye. Et avec eux toute une cohorte hétéroclite de conducteurs, car on ne le dira jamais assez : conduire c’est prévoir. A commencer par les moniteurs d’auto-école, et tous les conducteurs de voitures électriques, de vélos avec ou sans assistance, de chars Leclerc, de skateboards, de trottinettes, de sous-marins nucléaires lanceurs d’engins, de Manitou et de Mécalac, de frégates, de karts, de motos, de jeeps Willys, de De Dion-Bouton, de grues de chantier, de semi-remorques, de chalutiers, de drones, d’offshores, de flyboards, de F-117 Nighthawk, de fusées, navettes et cargos spatiaux, de Boeing ou d’Airbus, d’hélicoptères ou d’autogires, de planeurs, de TUB Citroën, de side-cars, de scooters, de caisses à savon, de voiturettes de golf, de camions-poubelles, d’ambulances, de VAB et de Hummer, de voitures sans permis, de ratracks ou de dameuses, de Tesla, de vedettes, de voiliers, de planches à voile, de chars à voile, de chasse-neige, de Rosalies, d’aéroglisseurs, de barques, de canoés, de kayaks, de TGV, de métros, de ferry-boats, de barges, de péniches, de Zodiac, de cuirassés, de croiseurs, de torpilleurs, de montgolfières, de Zeppelin, de parapentes ou de parachutes, de deltaplanes… J’aime les énumérations.

Hier, nouvelle découverte personnelle : l’oppidum d’Entremont, non loin de la maison, site archéologique en pleine nature où a été mise au jour une véritable petite ville bâtie par des tribus salyennes vers l’an 170 avant J.C. De multiples objets ont été retrouvés à l’occasion de plusieurs fouilles depuis les années 40 : monnaies grecques venues de Marseille, poteries, boulets de pierre projetés par les balistes romaines qui avaient pris la ville, et surtout des têtes de statues aux influences helléniques. Sur place, on peut voir des fours, les restes des remparts de la ville, un réseau d’écoulement des eaux pluviales, une pierre de pressoir à vin, ainsi que les bases des murs de dizaines d’habitations.
Ca m’a fait penser à deux autres sites de vestiges : celui de Pompéï, certes beaucoup plus vaste et remarquable. Et aussi, plus modestement aux vestiges du monastère de Saint-Géraud d’Aurillac. Je me souviens des espoirs démesurés suscités lors des découvertes aurillacoises dans les années 2000. L’archéologue responsable des fouilles, la larme à l’oeil, nous parlait d’une découverte majeure du haut moyen-âge en Europe, d’un nouveau Cluny. Bigre ! Les élus, des euros plein les yeux, voyaient déjà affluer des centaines de cars déversant leurs milliers de touristes quotidiens venus du monde entier pour découvrir ces vieilles pierres cantaliennes… Et puis, le soufflet est retombé, on s’est rendu compte que l’intérêt touristique de ces vestiges était proche de zéro. Mais plutôt que, comme ici, de les laisser à l’air libre en les consolidant pour en faire un agréable et pédagogique but de promenade, on a tout ensablé.
En tous cas, l’oppidum d’Entremont était presque désert hier, ce qui ne l’empêche pas d’être un très beau parc naturel sur trois hectares, très calme, avec une vue dominante sur les environs. Et surtout, il est à portée de baskets de chez moi, donc j’ai gagné une nouvelle destination de footing, avec un peu de dénivelé certes. Mais ça me rappellera le col de Toulousette, ou celui éponyme à côté de Murat et qui frôle les 1200m d’altitude.

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