50ème jour

Le 5 mai 2020

Si on nous avait dit au début que notre enfermement durerait 50 jours…
Je ne regarde plus la télé, j’évite l’actu sur le net. Car elle insuffle en moi des passions tristes. Je ne sais pas si c’est pareil pour vous, mais peu à peu a grandi en moi une complète détestation des hommes politiques. Je ne peux plus les voir, ils me répugnent, m’énervent au plus haut point. Je les hais, je les vomis, les exècre. En premier lieu le premier ministre Edouard Philippe, sorte de Gandalf taciturne, sempiternellement triste d’avoir raté partiellement sa transformation en Gandalf le blanc. Il paraît qu’il pratique la boxe ? Ca me donne envie de m’y mettre aussi ! Il y a aussi son acolyte neurologue isérois, Olivier Véran, avec son brushing de premier de la classe, ce qui ne l’empêche pas de nous menacer tous les jours de représailles pour non-respect du confinement (lui qui n’est pas confiné). Ah ces hommes politiques qui nous mentent pour masquer leur incompétence et leur indécision, sur les masques, sur les tests, sur la contagiosité des enfants, sur l’hydroxychloroquine… Ils ont choisi depuis le début de cette crise la médiocrité de la communication politique plutôt que la transparence et la sincérité. L’histoire les oubliera vite, ou les érigera en contre-exemples, comme on a oublié ou totémisé les tristement célèbres André Maginot, Maurice Gamelin, ou Philippe Pétain… Possible que la justice ne les oublie pas, elle. Vivement 2021, pour le vaccin et les procès.

Heureusement, tous nos espoirs sont désormais tournés vers le retour à une vie normale dont la première étape serait le 11 mai prochain, avec un début d’assouplissement des mesures liberticides en vigueur dans notre pays depuis la mi-mars. Ca me donne envie de relire les deux romans souvent cités en ce moment : 1984 de George Orwell et Le Meilleur des Mondes d’Aldous Uxley, ou si on est moins en forme d’en visionner les adaptations cinématographiques.
C’est marrant parce qu’on évolue dans un monde de moins en moins violent et risqué, quoiqu’on en dise, alors que les mesures liberticides sont de plus en plus fréquentes : les terroristes ou les virus, qui ont existé de tous temps, fournissent maintenant des prétextes plausibles afin que les français acceptent sans broncher des restrictions essentielles de leur liberté. Des restrictions si radicales que nos ancêtres les auraient sans doute vigoureusement combattues. A chaque fois, il s’agit de faire bien peur à tout le monde pour que ces mesures soient acceptées, voire demandées par la population. Problème : on a fait tellement peur aux gens que certains ont développé une phobie du déconfinement, ils ont peur de sortir et de reprendre une vie normale. Didier Raoult a raison quand, lors de son intervention télévisée sur BFMTV l’autre jour, il disait craindre moins le coronavirus que la peur, diagnostiquant que notre société était « en pleine crise de nerfs ».

J’essaie de m’abstraire de ce contexte nuisible et déprimant. Dimanche, profitant d’une première éclaircie depuis de nombreuses journées mouillées, je suis sorti pour un footing, en dépassant allègrement la barrière du kilomètre autoritaire, ce qui m’a permis de varier les paysages. J’ai croisé un troupeau de joyeuses Salers paissant dans un pré vert fluorescent, et qui ignoraient superbement les « gestes barrières » et autres « mesures de distanciation ». Appelez les flics, bordel !
Je ne me souvenais plus que les Salers étaient aussi belles. Beaucoup de promeneurs paisibles vers Naucelles, aucune voiture, aucun moteur, aucun vélo même, uniquement une propulsion pédestre. On se serait cru au XIXème siècle. A part les tenues. Les hauts de forme, les montres à gousset, et les robes à corsets ont depuis longtemps été remplacés par les jeans, baskets et jogging. On a moins la classe de nos jours, il faut bien le reconnaître.

Le soir, tentative de film rigolo sur Netflix, on a découvert Very Bad Trip, avec Bradley Cooper, qu’on a bien aimé. On a bien ri lors de scènes délirantes de cet enterrement de vie de garçon, et on a été captivés par le scénario, habituel parent pauvre des comédies, a fortiori américaines. Le lendemain, on a voulu renouveler l’expérience avec le deuxième opus, qu’on vous déconseille dans la mesure où l’histoire est quasiment identique au premier. A un point que je me demande bien comment les scénaristes n’ont pas eu honte de présenter une tel travail de fainéants.

Là, je lis un livre assez réjouissant, « Le livre des Départs », écrit par Velibor Colic, un écrivain croate arrivé en France en 1992, qui explique dans cet ouvrage très largement auto-biographique sa quête pour devenir un écrivain en langue française édité chez Gallimard. Le style est simple, télégraphique. C’est drôle, et touchant, j’ai beaucoup aimé les quelques pages qui se déroulent à Marseille lorsque l’auteur y bénéficiait d’une résidence d’écrivain, et notamment son intervention dans une classe de la dernière chance dans les quartiers du nord de la cité phocéenne.
Ce livre iconoclaste d’un auteur qui se prend pour Hemingway (pour l’addiction à l’alcool), s’avère particulièrement précieux en ces temps d’isolement, où le risque d’abattement est important si on n’y prend garde.

Mais le plus motivant, ça reste de commencer à prévoir ce qu’on pourra vivre après le déconfinement. Je tiens déjà une liste dans ma tête :
– Partir à Aix voir où en sont les travaux de la maison, et s’il y a toujours des grenouilles dans la piscine. Car le confinement du pisciniste est le paradis du batracien.
– Me transformer en agent immobilier pour faire visiter la maison d’Aurillac et la vendre
– Prendre l’apéro ou organiser un barbecue avec des amis. Ou plutôt non, prendre PLEIN d’apéros, et organiser des barbecues tous les jours !
– Assister à un concert quel qu’il soit
– Voir un film au ciné d’Aurillac, ou en 4DX au Pathé Plan de Campagne
– Flâner au marché d’Aix le dimanche
– Partir à vélo dans la campagne sur une route départementale déserte
– Monter au Puy Mary, et revenir en n’oubliant pas la tarte aux myrtilles de la Guiguite à Mandailles
– Sortir sans raison, juste pour goûter au plaisir de n’avoir plus besoin de demander l’autorisation à quiconque
– Faire son footing sans l’oeil désapprobateur du passant hypocondriaque
– Savourer un verre à la terrasse d’un café
– Prendre un bain de soleil puis de mer (ou l’inverse) sur une plage languedocienne. Pour une fois, je tolérerais même la tramontane.
– Faire la bise à ses proches comme avant. Il paraît qu’à Marseille, on doit se faire la bise entre mecs. Ca va me demander un temps d’adaptation. Je me rappelle que ça m’avait un peu traumatisé que mon beau-frère me tape la bise lors de notre première rencontre.
– Aller au resto avec des amis et refaire le monde l’espace d’une soirée (en évitant l’écueil du déclinisme cantalien)
– Prendre contact avec plein d’aixois pour envisager ma vie professionnelle d’après, car il va bien falloir que je trouve un projet digne de ce nom, et digne de moi !

Commentaires

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  1. Catherine LOPES DE MACEDO

    le 5 mai 2020

    merci pour ce billet d’humeur. J’ai vu Velibor Colic dans la Grande Librairie de France 5. Je le mets sur ma liste de prochaines lectures. Bon déconfinement !

  2. Christophe

    le 5 mai 2020

    Ah la célèbre bise du sud… Ne te sens pas obligé. Tu pourras toi même édicter la distanciation sociale que tu jugeras nécessaire 😁.
    Cela fait tellement longtemps que l’on ne s’est pas vu que j’accepterai que tu me donnes une franche et virile poignée de main 😊
    A bientôt dans le Sud.

  3. lightman

    le 5 mai 2020

    Catherine> C’est aussi à la Grande Librairie que je l’ai découvert !

    Christophe > En Auvergne, la bise est hétérosexuelle ou n’est pas 🙂 Va pour la poignée de main !

  4. Christophe

    le 5 mai 2020

    @Lightman : je respecte ce choix 👍 mais tu verras dans quelques années, tu te laisseras prendre au « jeu ». 😅

  5. michel Delort

    le 6 mai 2020

    Le lien qui suit n’a rien à voir avec votre « 50ème jour », or mis la photo qui l’illustre. Il vous permettra de découvrir un des plus grands architectes français du XXème siècle quasiment tombé dans l’oubli.
    https://www.arte.tv/fr/videos/095512-000-A/marseille-reveillee-par-fernand-pouillon/
    Bonne découverte!

  6. lightman

    le 6 mai 2020

    Michel> Merci beaucoup, je vais regarder ça, les premières images sont magnifiques.

  7. Matthieu Requenna-Cazanave

    le 14 mai 2020

    Merci pour ce billet, j’y souscris quasi totalement 😉