« Bon sang, mais c’est dingue, on dirait la voix de Johnny ». Et effectivement, l’illusion est parfaite, lors d’une écoute à l’aveugle, c’est bluffant, Jean-Baptiste Guégan a la même voix que feu l’idole des jeunes. A tel point qu’on dit même que ce serait son sosie vocal. Et ça marche, l’album « Puisque c’est écrit » s’est écoulé en plus de 100.000 exemplaires en seulement 45 jours de commercialisation, ce qui par les temps qui courent est une réussite imprévisible et fulgurante. Quand on y repense, pour beaucoup de ses plus ardents supporters, Johnny était bien plus qu’un chanteur, même plus qu’un ami ou un membre de leur famille, un véritable Dieu. Finalement, prenant les fans au mot, les producteurs ont commercialement et vocalement ressuscité Johnny, un tour de force qui donne matière à réflexion… Notamment sur le fait que nos sociétés ont occulté l’idée de la mort, au point parfois de la nier, jusque dans le divertissement le plus populaire. Johnny est mort, vive Jean-Baptiste.

Les sosies de stars, ça m’évoque encore une comédie, le film Podium où un frétillant Benoît Poelvoorde campait « le meilleur sosie de Claude François », accompagné d’un hilarant Jean-Paul Rouve en sosie officiel de Polnareff. Jusqu’à présent c’était ça les sosies, des gens très nostalgiques de leur jeunesse et qui rejouaient de façon un peu pathétique sans cesse le même match. Il y a un public pour ça, sur les parkings pluvieux de supermarché, dans les salles des fêtes exiguës de villages, ou les foires-expo de sous-préfectures.

Peut-être que c’est en train de changer. Avec les technologies numériques, il serait maintenant bien plus facile pour un algorithme d’effectuer une recherche pour trouver un sosie parmi des millions de personnes. Peut-être que Google Images ou Facebook nous permettront un jour de trouver notre propre sosie. Peut-être que Ok Google, Siri, ou Alexa nous permettront comme Johnny de trouver notre sosie vocal. On pourrait même aller plus loin que cela. Pourquoi ne pas considérer de rechercher le sosie podal de Zinedine Zidane ? Pourquoi Tinder et Meetic ne permettraient pas de rechercher le sosie mammaire de Pamela Anderson, ou alors le sosie labial de Julia Roberts, à moins que le sosie fessier de Keyra Agustina ait votre préférence ? Dans une salle de sport, on pourrait mettre au point un programme de musculation sur mesure, et la machine vous donnerait à chaque étape votre pourcentage de ressemblance avec un sosie pectoral ou abdominal de Arnold Schwarzenegger – de l’époque Monsieur Univers hein, pas l’époque gouverneur de Californie.
Et pourquoi pas un programme pour rechercher votre sosie cérébral ? Vous allez me dire que c’est déjà fait pour ce qui concerne notre cerveau de consommateur, dans la mesure où la plupart des GAFAM sont capables de vous en dire plus sur vous que nous n’en savez vous-même, avec un jour proche la possibilité de prédire vos actes d’achat avant même que vous en ayez conscience – Amazon est sur le coup, si si.

Au-delà du succès commercial ou de la question de savoir si tout cela est éthique, la résurrection de Johnny par Jean-Baptiste Guégan ouvre une ère où il sera de plus en plus facile de se comparer à des millions d’autres individus, et de trouver des similitudes physiologiques, vocales, ou autres. Ce qui inévitablement devrait produire quelques surprises.
Depuis la mort de Jacques Chirac, il paraît qu’on s’active à LR pour trouver son sosie. Le parti en a cruellement besoin. On sait que ça a pris près de 2 ans pour Johnny, encore quelques mois à patienter pour que les ordinateurs trouvent un sosie électoral de Chirac. En attendant, mangez des pommes.